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Les boîtiers connectés promettent des assurances auto sur-mesure, basées sur l’analyse en temps réel du comportement du conducteur. En échange d’une conduite prudente, certains automobilistes bénéficient de réductions sur leur prime d’assurance.
Mais ces dispositifs, aussi appelés « pay as you drive », soulèvent des questions cruciales : jusqu’où vont-ils dans la collecte de données ? Quels risques pour la vie privée ? Et surtout, ces boîtiers ne servent-ils qu’à récompenser les bons conducteurs, ou bien permettent-ils aussi de surveiller et sanctionner les moindres écarts ?
Un dispositif qui suit vos moindres déplacements
Les assureurs proposent ces boîtiers comme une solution innovante pour adapter les tarifs d’assurance aux habitudes de conduite. Concrètement, un petit appareil est installé dans le véhicule et enregistre une série de données : vitesse, accélérations, freinages brusques, trajets effectués et même heures de conduite.
Auto-motoA partir de quand peut-on changer d’assurance auto et quelles sont les conditions ?Selon une étude du cabinet Deloitte en 2023, 12 % des conducteurs français ont déjà souscrit une assurance auto basée sur ces dispositifs, que l’on peut d’ailleurs retrouver dans les comparateurs en ligne les plus populaires comme ornikar. Aux États-Unis, cette technologie séduit encore plus : 21 % des automobilistes y sont abonnés. Les compagnies d’assurance avancent des arguments séduisants :
- prime réduite ;
- sécurité accrue ;
- incitation à adopter une conduite plus responsable…
Mais ces avantages cachent une réalité moins reluisante : certaines données personnelles sont collectées et conservées par les assureurs, parfois sans véritable transparence sur leur utilisation.
Une surveillance qui peut vous coûter cher
Les assureurs s’appuient sur ces données pour ajuster le prix des contrats, mais aussi pour détecter des comportements à risque. Un conducteur qui freine trop souvent brusquement ou roule à des heures tardives peut voir sa prime augmenter. Pire encore, certains contrats prévoient une résiliation automatique si le conducteur ne respecte pas certaines règles fixées par l’assureur.
En Italie, où ces boîtiers sont plus largement répandus, l’association de consommateurs Altroconsumo a révélé en 2022 que certaines compagnies appliquaient des pénalités pouvant aller jusqu’à 30 % sur la prime d’assurance en cas de conduite jugée « dangereuse ». En France, aucune réglementation stricte n’encadre encore l’usage de ces données, laissant la porte ouverte à des pratiques opaques.
Des données partagées avec d’autres entreprises ?
Un autre enjeu majeur concerne la confidentialité des données collectées. Les assureurs affirment que les informations restent confidentielles, mais plusieurs enquêtes ont révélé que certaines entreprises les partagent avec des tiers. Par exemple, des constructeurs automobiles ou des sociétés spécialisées dans le marketing ciblé peuvent y avoir accès.

En 2021, un rapport de la CNIL (Commission nationale de l’informatique et des libertés) alertait sur le manque de contrôle sur l’utilisation des données. Sans cadre législatif strict, les utilisateurs ignorent souvent comment leurs informations sont exploitées. Cette question devient d’autant plus préoccupante avec l’émergence des véhicules autonomes et de la conduite assistée.
Un choix qui divise les automobilistes
Face à ces enjeux, les conducteurs restent partagés. Certains apprécient les réductions tarifaires qu’offrent ces boîtiers et y voient une incitation à mieux conduire. D’autres dénoncent une intrusion excessive dans leur vie privée et redoutent un modèle où chaque infraction, aussi minime soit-elle, pourrait avoir des répercussions financières immédiates.
Selon un sondage réalisé par Ipsos en 2023, 47 % des Français se disent préoccupés par l’usage de leurs données personnelles dans le cadre des assurances connectées. Seuls 29 % se déclarent prêts à adopter ce type de contrat si cela leur permet d’économiser sur leur prime.
Vers une régulation plus stricte ?
Les instances européennes commencent à se saisir du sujet. En janvier 2024, la Commission européenne a proposé une réglementation visant à renforcer la transparence des assurances connectées et à limiter la conservation des données à un strict minimum.
Auto-motoAssurance moto au kilomètre : Comment ça marche et combien ça coûte ?L’enjeu est de taille : garantir un équilibre entre innovation technologique et protection des droits des consommateurs. Comme le souligne Isabelle Falque-Pierrotin, ancienne présidente de la CNIL :
Le développement de ces technologies ne doit pas se faire au détriment des libertés individuelles. Il est urgent d’établir un cadre juridique clair pour protéger les automobilistes.
En attendant une législation plus stricte, les conducteurs doivent rester vigilants quant aux conditions des contrats d’assurance connectée. Car si ces boîtiers peuvent se révéler avantageux, ils imposent aussi une surveillance accrue, avec des conséquences parfois lourdes sur leur portefeuille et leur vie privée.